Aller plus loin avec les applications mobiles

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Tout le monde connaît l’adage « mieux vaut prévenir que guérir », et avec l’essor des applications mobiles et leurs fonctionnalités toujours plus sophistiquées, il est aujourd’hui plus facile d’être en meilleure santé. Mais quels sont les pièges, et que peuvent faire les éditeurs pour proposer des applications plus sûres et véritablement axées sur la santé et le bien-être ?

Calories consommées et brûlées, pression artérielle, taux de glycémie, nombre de pas réalisés ou de mètres grimpés… Nous pouvons désormais mesurer à peu près tout ce que nous souhaitons sur un appareil qui tient dans la main. Obtenir ce que nous voulons d’un simple geste sur un écran est devenu une habitude de plus en plus marquée, et les développeurs d’applications, conscients de cette tendance, font tout pour répondre à la demande et l’alimenter. Ce n’est pas pour rien que le cabinet de recherche spécialisé R2G a dénombré entre 400 000 et 500 000 applications de santé et de remise en forme en 2019, contre 325 000 en 2017.

Young woman wearing headphones, crouched halfway up a flight of steps, performs stretching exercises before her run.

Ces technologies se multiplient au même rythme que notre soif pour ces informations. Leur utilité est également de plus en plus reconnue. L’Allemagne, par exemple, se prépare en ce moment même à faire adopter une loi qui autoriserait dans les mois à venir les médecins allemands à prescrire des applications de santé. D’autres pays devraient bientôt lui emboîter le pas.

Mais qu’entend-on réellement par santé et bien-être ? L’Organisation mondiale de la Santé en donne la définition suivante : « un état de complet bien-être physique, mental et social [qui] ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». Pour Todd Cooper, spécialiste mondial de la technologie normalisée des équipements médicaux et de l’informatique de santé, et Président du groupe technique consultatif aux États-Unis (US/TAG), l’essor des applications liées à la santé et au bien-être fait écho à la quête d’une vision plus holistique de la santé.

La santé et le bien-être reposent en grande partie sur l’alimentation et le mode de vie, deux facteurs qui sortent du cadre purement médical. « Ces éléments sont très faciles à intégrer dans des applications », explique M. Cooper. « Si les applications de santé gagnent en popularité, c’est également parce que les gens font davantage attention à eux, s’intéressent de plus en plus à la technologie et cherchent des moyens de reprendre leur vie en main. »

Le boom des applications

Le marché propose un florilège de technologies applicatives. Certaines utilisent des capteurs internes pour mesurer ce qu’il se passe à l’intérieur de notre corps, d’autres enregistrent des données externes telles que la température. Certains capteurs, à l’instar de ceux utilisés dans le milieu médical, peuvent détecter une altération de notre état de santé bien avant que nous nous en rendions compte nous-mêmes. Sans oublier les algorithmes capables d’effectuer des calculs difficiles à réaliser par le commun des mortels : compter des calories, calculer des distances parcourues, évaluer un indice de masse corporelle, mesurer les progrès réalisés en termes de poids soulevés et de répétitions, etc.

Black sports watch, smartphone and headphones placed on a pair of yellow and red sneakers on the grass.

Le marché propose un florilège de technologies applicatives.

Parmi les applications populaires, nous pouvons citer Headspace pour la méditation, MyFitnessPal pour le comptage des calories et Endomondo Sports Tracker qui intègre la fonction GPS de votre téléphone à votre activité physique pour suivre vos déplacements et mesurer la distance parcourue et les calories brûlées. Il existe également des applications pour le sommeil qui mesurent vos cycles et vous réveillent au bon moment, d’autres qui vous aident à arrêter de fumer en enregistrant vos envies de cigarette et votre progression, ou encore des appareils tels que l’Apple Watch qui prétendent pouvoir générer un électrocardiogramme que vous pouvez transmettre à votre médecin.

Si l’on ajoute à cela les innombrables applications de motivation qui proposent des recommandations personnalisées en fonction de la masse d’informations que nous leur communiquons, on n’est pas loin d’affirmer que les applications ont le pouvoir de changer le monde, à condition d’être utilisées correctement. Alors, où est le piège ?

Senior gentleman pointing to the data on his smartphone health app as he discusses with his doctor.

Des risques à prendre en compte

Comme pour chaque tendance, lorsqu’un secteur d’activité se développe, les risques potentiels se multiplient. Comme le précise M. Cooper : « Il est question ici de risques réels et de risques perçus. Imaginons que vous utilisiez une application pour trouver la station-service la moins chère dans un rayon de dix kilomètres. Si elle ne fonctionne pas ou qu’elle vous envoie dans la mauvaise direction, rien de grave, vous aurez probablement plus de chance la prochaine fois. Mais lorsque cela a trait à notre santé, les risques touchent la personne, et peuvent aller du petit désagrément à l’appel au SAMU, voire à la mort. Si, par exemple, une application de dosage médicamenteux fait une erreur en mettant la virgule au mauvais endroit, les conséquences peuvent être dramatiques. »

Pour Gora Datta, spécialiste mondial de l’e-santé et des technologies de communication et de l’information mobile auprès de lʼISO/TC 215, le comité technique de lʼISO pour l’informatique de santé, les risques proviennent également du fait que ces applications ont accès à des données médicales et d’identification personnelle très précises sur l’utilisateur. « Cela soulève des interrogations sur le respect de la vie privée, la sécurité, le contrôle des autorisations et la confidentialité, mais aussi sur l’intégrité de l’infrastructure », avance-t-il.

« Nous devons également définir plus clairement comment gérer, dans la pratique, le stockage et la gestion des données, la disponibilité et la maintenance du réseau, sans oublier la compatibilité et l’interopérabilité. » Certaines normes et réglementations ont déjà été établies en ce sens. Si l’agence américaine Food and Drug Administration (FDA) reconnaît par exemple les nombreux atouts de la technologie de l’information sanitaire, elle exige cependant une évaluation et une gestion strictes des risques associés.

Dans son rapport intitulé FDASIA Health IT Report – Proposed Strategy and Recommendations for a Risk-Based Framework, la FDA precise : « Une infrastructure informatique de santé nationale présente de très nombreux avantages pour les citoyens américains, notamment la prévention des erreurs médicales, des soins plus efficaces et de meilleure qualité, des coûts réduits et une plus grande implication des consommateurs. Toutefois, lorsque cette informatique de santé n’est pas conçue, développée, mise en œuvre, gérée et utilisée dans les bonnes conditions, elle peut représenter un risque pour les patients. » Ainsi, si l’utilisation des applications de santé mobiles présente un intérêt notable en matière de santé publique, il est essentiel d’identifier, de développer et d’adopter des normes et des bonnes pratiques pour établir un cadre informatique de santé qui encourage l’innovation et protège les patients.

La normalisation en première ligne

Faisons un point sur le paysage normatif actuel. Ces dernières années, de nombreux organismes se sont penchés sur la question épineuse de l’informatique de santé. La Commission électrotechnique internationale (IEC) a notamment entrepris de guider les développeurs d’applications. Publiée en 2010, sa Norme internationale IEC 80001-1, Application du management du risque aux réseaux des technologies de l’information contenant les dispositifs médicaux – Partie 1 : Rôles, responsabilités et activités, définit les actions qu’une organisation responsable doit mettre en œuvre pour identifier, atténuer et gérer les risques associés au déploiement de dispositifs et de systèmes médicaux sur les réseaux informatiques.

Néanmoins, il n’existe à ce jour aucun processus officiel de certification des applications de santé mobiles permettant de garantir leur sécurité et leur fiabilité. La BSI, membre de l’ISO pour le Royaume-Uni, a publié en 2015 la PAS 277, Health and wellness apps. Quality criteria across the life cycle. Code of practice. Cette spécification publiquement disponible a été très bien accueillie au Royaume-Uni. Prenant en compte l’évolution rapide du marché des applications de santé et de bien‑être, ainsi que les inquiétudes quant à leur qualité et à leur fiabilité, elle établit des lignes directrices permettant de développer des applications médicales sans risque. L’accueil favorable qui lui a été réservé prouve qu’il y avait une réelle nécessité de fournir des directives au niveau international découlant d’une harmonisation des travaux menés dans différents pays et d’une mise en commun des compétences mondiales. Dans cette optique, l’ISO/TC 215 travaille actuellement avec le comité technique du Comité européen de normalisation CEN/TC 251, Informatique de santé, au développement d’une spécification technique dédiée aux applications de santé et de bien-être, qui sera utilisable à l’échelle internationale.

Par ailleurs, Health Level Seven International (HL7), un organisme d’élaboration de normes sans but lucratif accrédité par l’ANSI, membre de l’ISO pour les États-Unis, a permis quelques avancées dans ce domaine en publiant en juin 2018 la version expérimentale de sa norme Consumer Mobile Health Application Functional Framework (cMHAFF), qui fournit des lignes directrices aux développeurs d’applications de santé mobiles.

Des applications de confiance

Actuellement en cours dʼélaboration, la future spécification technique ISO/TS 82304-2, Health software – Part 2 : Health and wellness apps – Quality and reliability (titre encore indisponible en français), qui sera utilisée conjointement avec IEC 82304‑1, Logiciels de santé – Partie 1 : Exigences générales pour la sécurité des produits, vise à instaurer une confiance sans faille envers les produits logiciels de santé, tels que les applications. Son élaboration a été confiée au groupe de travail mixte JWG 7 du comité technique ISO/TC 215, qui collabore avec le CEN/TC 251. En outre, selon Nicholas Oughtibridge, co-Animateur du JWG 7, le document se concentre sur « les aspects de la santé, du bien-être et des soins de santé qui sont de plus en plus plébiscités et intégrés dans l’informatique de santé, ainsi que sur les besoins spécifiques liés au vieillissement de la population ».

ISO/TS 82304-2 établira des exigences pour le développement des applications de santé et de bien-être, afin de répondre aux attentes des professionnels de santé, des patients, des soignants et du grand public. « Cette norme proposera un ensemble de critères de qualité et couvrira le cycle de vie complet du projet, du développement à la mise à jour de l’application en passant par la phase de test et la commercialisation. Elle concernera les applications Web, hybrides et natives, les applications associées aux équipements portables et autres dispositifs de santé, et les applications reliées à d’autres applications », précise M. Oughtibridge.

Les impacts potentiels sont nombreux. La spécification technique fournira des lignes directrices à toute entreprise qui développe des applications. Elle sera utile non seulement aux entreprises technologiques, mais aussi aux organismes nationaux de réglementation des technologies de la santé et aux administrations de santé publique. M. Cooper ajoute qu’elle profitera également, entre autres, aux consommateurs, aux organisations de défense des consommateurs et aux chercheurs dans le domaine des soins de santé. Elle sera également en mesure de contribuer directement aux Objectifs de développement durable des Nations Unies 3 (Bonne santé et bien-être) et 9 (Industrie, innovation et infrastructure).

Née d’un consensus international, ISO/TS 82304-2 est en phase de devenir une plateforme unique d’innovation dans le secteur de la santé, qui permettra de développer des technologies plus efficaces et plus sécurisées. Sa publication est prévue l’année prochaine. Face au vieillissement de la population et au nombre croissant de maladies chroniques liées au mode de vie, des applications mobiles efficaces, développées et utilisées de façon appropriée seront plus que bienvenues. En les axant sur la sécurité et la confidentialité des données, elles auront également l’avantage de remettre la santé entre les mains des consommateurs. Parce que la santé n’attend pas !

Female swimmer checks her fitness watch during exercise in an outdoor pool.
Juillet/Août 2020

Bien-être

Dans ce numéro sur le bien-être, vous trouverez de bons conseils santé, des explications quant à l’intérêt des normes relatives au sport et au vélo électrique, des articles sur les spas médicaux et la thalassothérapie, ainsi qu’une foule de renseignements sur l'extraordinaire dynamisme de l’industrie …

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Elizabeth Gasiorowski-Denis
Rédactrice en chef d'ISOfocus