Rapport de prospective : Amplifier la transition énergétique
Alors que la consommation d’énergie explose, la plupart des pays accélèrent la décarbonation de leur secteur énergétique. Découvrez ici les tendances clés de la transition énergétique mondiale.
Le Rapport de prospective de l’ISO met en lumière les tendances mondiales qui, dans de nombreux secteurs, orienteront la prise de décisions stratégiques pour un avenir meilleur. À partir de ces éléments de prospective, l’ISO examine certains des domaines potentiels de normalisation. Dans une série d’articles, nous analysons avec les meilleurs spécialistes quelques-unes de ces tendances mondiales critiques.
Transformer le secteur énergétique afin de limiter au maximum les émissions de gaz à effet de serre est désormais une priorité absolue partout dans le monde. Afin de respecter les objectifs de l’Accord de Paris, il nous faut abandonner de toute urgence les combustibles fossiles, développer plus largement les sources d’énergie, décarbonées et sobres en carbone, renforcer le captage de CO2, et améliorer tous les aspects du management de l’énergie, de la production à l’utilisation.
Parallèlement, la consommation d’énergie ne cesse d’augmenter, et avec l’accroissement de la demande en électricité – induite par la croissance démographique et économique, la demande mondiale en énergie pourrait augmenter de 40 % à 60 % d’ici 2050. La transition énergétique est un véritable défi, mais un défi qui ressemble de plus en plus à une opportunité.
La transition énergétique nécessitera de modifier la façon dont l’énergie est distribuée.
Réduction des émissions de carbone
Répondre à la demande croissante en énergie tout en limitant les émissions de gaz à effet de serre suppose de développer considérablement les énergies décarbonées et sobres en carbone : éolien, solaire, hydroélectricité, nucléaire, géothermie, bioénergie, etc. Il y a des raisons d’être optimiste : les énergies renouvelables sont actuellement les modes de production d’énergie dont la croissance est la plus rapide, avec des investissements massifs dans de nombreux pays. Les énergies renouvelables, et plus particulièrement l’énergie solaire, font même concurrence aux combustibles fossiles plus rapidement que prévu.
Malgré leur impressionnante croissance, les énergies renouvelables seules ne pourront pas répondre à la demande grandissante en énergie, sans qu’une solution miracle fondée sur l’innovation technologique vienne améliorer leur efficacité et réduire leur coût. Il faudra donc vraisemblablement les associer à l’énergie nucléaire et au captage de CO2, et améliorer les mesures d’efficacité énergétique, pour parvenir à répondre à la demande.
La demande mondiale en énergie pourrait augmenter de 40 % à 60 % d’ici à 2050.
Stockage de l’énergie
Les technologies de stockage de l’énergie, comme les batteries ou les barrages hydroélectriques, permettent de retenir l’énergie dans des systèmes pour la libérer ensuite en fonction des besoins. Ce sont des outils essentiels pour la transition énergétique, car ils permettent aux réseaux électriques de satisfaire la demande en complétant l’approvisionnement intermittent des énergies renouvelables.
À ce jour, aucune batterie n’est capable de stocker et de fournir d’importantes quantités d’électricité de manière économique pour un déploiement à grande échelle. Mais le concept est prometteur. Les investissements affluent dans la recherche et le développement sur les batteries, et le marché mondial des batteries pourrait atteindre USD 22,3 milliards d’ici 2027.
Par ailleurs, l’utilisation directe de l’énergie pourrait à terme se révéler plus économique, et raviver l’intérêt pour les technologies de conversion d’énergie directe qui transforment les sources d’énergie en chaleur, en électricité ou en combustible, comme l’hydrogène vert ((produit à partir d’une électricité renouvelable par un processus d’électrolyse de l’eau). L’hydrogène, dont les exportateurs de pétrole espèrent qu’il jouera un rôle majeur dans leur économie, pourrait à terme remplacer les combustibles fossiles dans les secteurs les plus difficiles à décarboner comme le transport ou la sidérurgie.
Distribution de l’énergie
La transition énergétique nécessitera de modifier la façon dont l’énergie est distribuée, avec des réseaux basculant vers des modèles distribués plus dynamiques pour en améliorer l’efficacité. Par ailleurs, la numérisation en cours du secteur énergétique pourrait contribuer à rationaliser la consommation énergétique grâce à l’introduction de compteurs intelligents et à l’utilisation de l’intelligence artificielle pour mieux gérer les réseaux, par exemple, en activant les appareils uniquement lorsque l’offre d’énergie est abondante.
L’infrastructure physique du secteur énergétique fait également face à de nombreux changements. Les lignes ultra-haute tension en courant continu vont considérablement améliorer la transmission de l’énergie sur de longues distances, ce qui aura un impact majeur sur la façon dont l’énergie est transportée : le transport de charbon destiné à la production d’énergie pourrait ainsi être réduit de moitié d’ici 2050. Dans le même temps, les systèmes d’énergie distribués suscitent un intérêt croissant, à l’instar des microréseaux et des réseaux de chauffage urbain.
La transformation de nos systèmes complexes d’énergie est un immense défi.
Gestion de la transition énergétique
La transition énergétique est un défi inédit pour tous les pays et toutes les organisations dans le monde. L’ISO l’a reconnu en adoptant l’année dernière la Déclaration de Londres qui traduit son engagement à œuvrer efficacement en faveur du climat par le biais des normes.
Les normes relatives à l’énergie sont déjà nombreuses. À elle seule, l’ISO propose plus de deux cents normes pour ce secteur. Le prochain défi ne sera pas seulement d’élaborer de nouvelles normes, bien que cela soit possible pour certaines technologies émergentes comme le captage de CO2, mais également de s’assurer que les normes existantes sont utilisées au mieux, notamment en collaborant avec les entreprises du secteur énergétique et autres parties prenantes, et en les informant dans les délais requis par l’urgence de la tâche.
La transformation de nos systèmes énergétiques complexes est un immense défi et la source probable de nombreux intérêts divergents. Or, les organismes de normalisation peuvent faciliter cette transition en proposant des lignes directrices sur lesquelles baser la coopération.
À propos de l’auteur
Roland Risser est le Président du comité technique ISO/TC 301, Management de l’énergie et économies d’énergie.